Jean Guidoni

J'Ai Marché Dans Les Villes
Et moi j'ai marché dans les villes Comme dans autant de vieux décors De l'opéra bien inutile Dont je me croyais le ténor J'ai marché au sein de ces foules Qui acclamaient je ne sais plus qui Et j'ai vu comment leur sang coule Pour peu que s'énervent les képis J'ai marché le long des vitrines Tout au long des longs murs souillés Et j'ai pissé dans les latrines De maints quartiers déconseillés Marche [Marche Marche] Chante-la nous encore ta rengaine Marche [Marche Marche] Regarde : le jour se lève à peine Marche [Marche Marche] Tu n'es pas au bout de tes peines Marché marché de par le monde Sous les hauts néons de Tokyo Dans Venise la moribonde Et sur l'échiquier de Rio Letras de canciones A Hambourg la rouge et perverse J'ai buté sur un simili D'accordéon de Hans Albers Expirant à Sankt Pauli Dans Prague dans Buda et dans Pest J'ai marché comme un galérien Et j'ai marché sans fin dans Brest Dans Brest dont il ne restait rien Marche [Marche Marche] Chante-la nous encore ta rengaine Marche [Marche Marche] Regarde : le jour se lève à peine Marche [Marche Marche] Tu n'es pas au bout de tes peines Où étiez-vous mes chers rebelles Et pourquoi fuir mes " I love you " Soldat Chveïk ou matelot Querelle Mes va-nu-pieds et mes voyous Toi le petit Jésus toi la Caille Djemila mi-cuir mi-satin Gagneuses au volant ou piétaille Mon dieu que j'aimais les putains Et vous aussi toutes mes grandes gueules Là-haut Quasimodo perché Gavroche et Till Eulenspiegel Dans l'éléphant ou le clocher Marche [Marche Marche] Chante-la nous encore ta rengaine Marche [Marche Marche] Regarde : le jour se lève à peine Marche [Marche Marche] Tu n'es pas au bout de tes peines J'ai marché dans les villes mortes Dans Dresde et dans Hiroshima Plus la peine de forcer les portes C'est toujours le même cinéma C'est noir et l'on croirait la forge D'un Vulcain devenu fou furieux On a de la poussière plein la gorge On a du chaos plein les yeux C'est Coventry et c'est Sodome Pas la peine de faire un dessin Une ville ça meurt tout comme un homme Et ses anges sont ses assassins Marche [Marche Marche] Chante-la nous encore ta rengaine Marche [Marche Marche] Regarde : le jour se lève à peine Marche [Marche Marche] Tu n'es pas au bout de tes peines J'ai marché dans des villes fétides Buenos-Aires avec Evita Et Gardel pour seules cariatides Attendait d'autres golgotha Los Angeles la délétère Las Vegas et Mahagonny Il y a tant de villes sur cette terre Qui n'espèrent que leur agonie Et qui pour cela se repoudrent Fleur de coca cœur de pavot Tandis qu'au loin tombe la foudre Sur Beyrouth et Sarajevo Marche [Marche Marche] Chante-la nous encore ta rengaine Marche [Marche Marche] Regarde : le jour se lève à peine Marche [Marche Marche] Tu n'es pas au bout de tes peines Ah qu'on ne me parle plus de ruelles De grands boulevards et de faubourgs Ni de ces métropoles cruelles Où j'ai mendié un peu d'amour Là ce n'était rien que deux routes Un carrefour défavorisé De l'herbe et des flaques de mazout C'est pourtant là qu'on s'est croisés Toi aussi tu venais de Charleville Et quand tu m'as demandé ton chemin Tu es devenu ma dernière ville Et je'n' t'ai plus lâché la main From Letras Mania